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Journal de bord semaine 19 - Du lundi 7 février au vendredi 13 février

Cette semaine, le journal est en deux parties: suivez les aventures de Niels et Margot sur base, et dans une deuxième partie les retrouvailles des autres membres de l'expédition avec les bénévoles de l'association !


Sur base scientifique (Niels et Margot)


Lundi 7 février


La semaine commence par une savoureuse surprise au petit déjeuner concoctée par Yan, notre voisin de bureau : de délicieuses petites galettes à base de pommes de terre, d’oignons et d’œufs appelées дepyнu (à prononcer « dèrouni »). Une spécialité particulièrement populaire en Ukraine et en Biélorussie. Yan est le « night duty » de la semaine, c’est-à-dire qu’il doit rester éveillé de minuit à 8h du matin et effectuer une ronde toutes les heures pour contrôler les principales installations techniques de la base. Il doit également nettoyer les sanitaires et les couloirs durant la nuit. Le reste de la journée, il est déchargé de toute tâche (mis à part ses protocoles scientifiques) et peut ainsi se reposer.

Cette semaine, le passage d’une rivière atmosphérique est annoncé sur la péninsule antarctique. Niels va donc avoir des journées particulièrement chargées car il va devoir collecter les précipitations toutes les heures durant toute la durée du phénomène, de jour comme de nuit. Pour lui prêter main forte, Margot va le remplacer pendant plusieurs jours afin d’effectuer ses prélèvements de neige quotidiens au sommet de l’île.

Andrii, le médecin de la base, a prêté à Margot un livre écrit par un ancien hivernant britannique à l’époque où la base Vernadsky s’appelait encore Faraday et était gérée par le Royaume-Uni. Len Airey a passé plus de deux ans sur place entre 1981 et 1982. Dans son témoignage On Antarctica, il raconte la rudesse des hivernages, les accidents tragiques qui peuvent survenir à tout instant sur le continent blanc coupé du reste du monde durant de longs mois, mais aussi la beauté somptueuse des paysages ou encore la guerre des Malouines, vécue à travers les communications radio entre les bases polaires britanniques et argentines. Un récit passionnant qui permet de découvrir quel était le quotidien sur la base 40 ans auparavant.

Mardi 8 février


La rivière atmosphérique a débuté et Niels enchaîne les prélèvements du matin au soir. Ce phénomène se caractérise par un épisode de précipitations (pluie et/ou neige) particulièrement intense ainsi que par un apport de chaleur qui entraîne une hausse des températures. Ce jour-là, Vernadsky enregistre un record absolu : 12,7°C à 23 :41 (UTC) ! C’est la plus haute enregistrée depuis que la température est mesurée sur la base, soit depuis les années 1940. D’autres records de température ont été enregistrés le même jour sur d’autres bases de la péninsule. Le dialogue des scientifiques entre les bases leur a permis de partager de nombreuses informations en temps réel sur la rivière atmosphérique, et d’envisager des analyses conjointes.

De son côté, Margot effectue deux entretiens durant la journée. Le premier avec l’un des biologistes de la base, en charge d’effectuer des collectes de zooplancton dans l’archipel des îles Argentines. L’étude du phytoplancton, et plus précisément de sa biodiversité, renseigne en effet sur l’adaptation des espèces aux changements environnementaux (climat, océan, etc.). Le plancton peut ainsi être considéré comme un indicateur des bouleversements en cours et de l’état de santé de l’écosystème austral. Le second entretien est effectué auprès du directeur du département de biologie de l’institut polaire ukrainien, présent sur la base dans le cadre de la campagne d’été. Il permet de contextualiser l’ensemble des protocoles menés à Vernadsky en lien avec le développement des recherches en biologie menées sur la base. Historiquement, Vernadsky était en effet réputée pour ses travaux en météorologie et en géophysique. Depuis une vingtaine d’années cependant, la base s’est ouverte à des programmes de biologie qui visent à étudier l’adaptation de l’écosystème local aux changements environnementaux et à l’impact humain, en particulier du tourisme.

Mercredi 9 février


L’épisode de rivière atmosphérique est quasiment terminé et laisse progressivement la place à un temps gris et venteux. Les précipitations de ces derniers jours ont contribué à faire fondre la neige autour de la base. A la surface de celle-ci se sont également déposées des micro-algues vertes et rouges, qui colorent le paysage. Leur analyse fait partie des programmes de biologie menés à Vernadsky. Il n’y a pas que la couverture neigeuse qui se transforme au fil des jours. Les jeunes manchots papous, nés pour la plupart il y a un mois et demi, grandissent à vue d’œil. Lorsque nous sommes arrivés à Vernadsky, ils étaient couvés par leurs parents et mesuraient une vingtaine de centimètres. Désormais, certains atteignent presque leur gabarit adulte et commencent à perdre leur duvet juvénile pour leur plumage imperméable qui leur permettra de se déplacer dans l’eau.

La journée de Margot est consacrée à la retranscription des entretiens qu’elle a menés la veille. La plupart des entretiens en sociologie sont enregistrés avec un dictaphone ; il est ensuite nécessaire de mettre par écrit l’échange qui s’est tenu afin de faciliter l’analyse des données. De plus, certains éléments ne peuvent pas être enregistrés par un dictaphone, et pour cause : la description du lieu de l’entretien, des remarques non verbales (gestes, attitude, etc.) peuvent également apporter des informations utiles. Il faut donc compléter la retranscription par un compte-rendu écrit des circonstances de l’entretien. Un travail fastidieux mais qui permet de replacer les données collectées dans un contexte factuel.

Jeudi 10 février


La grisaille de la veille contraste avec le splendide beau temps de ce jour : un soleil radieux et une faible couverture nuageuse. Surtout, la glace de mer qui s’accumulait la veille encore autour de l’île a pu être évacuée par le vent. L’accès est désormais libre pour se rendre en zodiac sur la plupart des îles autour de Vernadsky. Une excellente nouvelle en particulier pour les biologistes, qui doivent effectuer des collectes et des observations de terrain sur l’ensemble de l’archipel et sur des îles voisines. Une partie de l’équipe part pour la journée à Petermann island pour y réaliser un ensemble de protocoles : collecte de mousses et d’invertébrés, prélèvements d’eau de mer, recensement des espèces présentes sur l’île, etc… Les deux météorologues partent quant à eux faire des relevés océanographiques à l’aide d’une sonde CTD, qui mesure plusieurs paramètres sur une colonne d’eau de mer tels que la température, la salinité ou encore la luminosité.


De notre côté, nous profitons de ce temps idéal pour effectuer un autre protocole de Niels : des carottages de surface au niveau du sommet de l’île Galindez.


L’objectif est de prélever des échantillons de neige tous les 10cm sur toute la profondeur du manteau neigeux. Il faut pour cela creuser un trou jusqu’à arriver au niveau du glacier. Chacun part pour le sommet équipé d’une pelle, et se met à creuser vigoureusement pour atteindre la couche de glace qui se situe entre 60cm et 110cm de profondeur.



Les lunettes de soleil et une bonne couche de crème solaire sont de rigueur, car la couche d’ozone est plus fine au niveau de l’Antarctique et laisse davantage passer les rayons ultraviolets. Une fois l’ensemble des prélèvements terminés, Niels passe deux bonnes heures à conditionner ses échantillons dans ses fioles en verre avant de les placer dans la chambre réfrigérée de la base. Une bonne journée de travail qui se conclut par un film pour Margot.

Vendredi 11 février


Les jours se suivent et ne se ressemblent pas : aujourd’hui le temps est particulièrement maussade et n’incite pas à sortir sur le terrain. Le froid, le vent et la neige bloquent également l’avancée des travaux en extérieur que mène l’équipe de techniciens de la base. L’entretien d’une station telle que Vernadsky est un véritable défi, car la plupart des infrastructures sont anciennes et nécessitent une maintenance continuelle. L’institut polaire ukrainien a lancé un plan de modernisation de la base afin de remplacer une partie des installations techniques vieillissantes, et créer de nouveaux espaces. Mener ce genre de travaux en Antarctique n’a rien d’anodin, car cela suppose une énorme logistique pour acheminer tout le matériel nécessaire. De plus, l’avancée du travail est extrêmement dépendante de la météo, et ne peut s’accomplir que pendant l’été austral. Durant chaque journée de beau temps, l’équipe technique travaille ainsi du matin jusqu’au soir.

Si certaines installations datant de l’époque britannique sont progressivement remplacées sur la base, d’autres sont à l’inverse remises en service. C’est le cas de la station radio VFH, qui permet d’effectuer des communications à très longue portée. Aujourd’hui avec la connexion internet, il n’est plus nécessaire d’avoir un tel système radio et la plupart des échanges en Antarctique s’effectuent avec une radio à moindre portée. Sergiy et Yaroslav ont cependant eu envie de remettre en état la VHF de la station et après quelques heures de réglages, ils ont réussi à communiquer par radio directement avec l’Ukraine mais également avec l’Italie ou encore le Portugal !

Samedi 12 février


Ce samedi est marqué par le retour du soleil. Une nouvelle journée propice aux sorties pour les membres de la base. Margot accompagne les deux météorologues qui se rendent à Woozle Hill pour y effectuer des mesures géoradar. Cet appareil permet de cartographier la couverture glaciaire d’une zone grâce à des ondes envoyées dans le sol. Il est intéressant de mesurer régulièrement l’épaisseur de la couche de glace sur une même zone afin d’en étudier les évolutions saisonnières et annuelles. Après avoir quadrillé le sommet de l’île avec leur géoradar, les météorologues s’accordent une petite pause pour admirer la vue imprenable sur la péninsule et l’océan Austral.



L’après-midi du samedi est consacré à la préparation du buffet du soir. Margot et Niels passent donc en cuisine pour prêter main forte à Artem le cuisinier. Salade de crudités, pavés de saumon gratiné, brochettes de viande, toasts, … La cuisine se transforme en une véritable ruche ! Et les quantités cuisinées sont conséquentes, car tout ce qui ne sera pas consommé le soir même sera conservé pour le déjeuner du lendemain.

A 19h tout est fin prêt pour le repas. Une partie de l’équipe des biologistes manque à l’appel car ils ne sont pas encore rentrés de leur sortie du jour. De même que pour l’équipe technique, chaque journée de beau temps est exploitée à fond pour effectuer un maximum d’activités en extérieur. La soirée se poursuit au bar entre billard, dominos et discussions.

Dimanche 13 février


Bogdyn et Anton partent avec Margot durant l’après-midi pour un tour de l’archipel en zodiac. L’objectif est de contrôler l’état de la glace de mer et de déterminer quelles zones sont accessibles à la navigation. Si les alentours de la base sont désormais bien dégagés, de nombreux glaçons s’accumulent toujours à certains endroits, empêchant le zodiac d’avancer. Pour Bogdyn, cette sortie constitue l’un des rares moments passés en-dehors de la base depuis le début de l’année. En tant que commandant de la station, il doit en effet rester à Vernadsky la plupart du temps pour gérer le fonctionnement quotidien de la base. Cette parenthèse marine vivifiante nous fait du bien à tous les trois.

La semaine se conclut par une soirée au sauna avec baignade dans la mer pour Niels, et par une partie de billard pour Margot. Après quasiment une année passée sur la base, certains hivernants sont passés professionnels et dispensent avec plaisir conseils et techniques de jeu en cours du soir !


[Devinette de la semaine]

A quoi peut bien servir cet instrument ?



Réponse à la devinette de la semaine passée:

Il s'agissait du cri d’un phoque crabier que nous avons pu approcher de près lors d’une sortie en zodiac.


 

En France (Clément, Lana, Baptiste, Olivier et l'ensemble des bénévoles de l'association)


Clément, Baptiste, Lana et Olivier n'ont finalement pas pu rentrer en voilier car ils sont malheureusement tous tombés malades une fois arrivés à Ushuaia. Même en Terre de feu, la situation sanitaire est compliquée et le virus circule. Nos quatre étudiants chercheurs n'y ont pas échappé et ont donc dû attendre d'être guéris pour repartir. Le bateau n'a pas pu les attendre car le capitaine a un programme bien chargé et ne peut pas se permettre d'arriver en retard en France où d'autres missions l'attendent. Les quatre membres de l'expédition sont donc rentrés de leur côté, en avion. Margot et Niels rentreront quant à eux dans un mois.

Mardi 8 février


Tout juste rentré en France, Clément continue son travail d’étudiant chercheur en participant à des conférences. L’association Juste 2.0°C a été représentée à l’occasion du One Ocean Summit à Brest par Clément, Apoline et Amandine, deux membres bénévoles de Juste 2 degrés. Ils nous racontent leur séjour.



Après plusieurs heures de train, nous découvrons la ville et le soir, nous sommes invités par la Plateforme Océan & Climat à dîner. La Plateforme Océan & Climat (ocean-climate.org) est un réseau dont nous faisons partie et qui regroupe des instituts d’enseignement ou de recherche, des collectivités territoriales, des associations, des entreprises, des fondations ou encore des musées, qui sont préoccupés par la protection des océans. Nous passons donc une première soirée à Océanopolis, un grand aquarium où évoluent de nombreuses espèces de la biodiversité marine. Nous dînons au milieu des aquariums, entre poissons clowns, méduses et coraux.


Mercredi 9 février


Le matin du 9 février a lieu l’ouverture du One Ocean Summit sur le port de Brest. Nous regardons tous les trois en visioconférence la session d’ouverture et les premiers ateliers. Il s’agit d’une rencontre entre des personnalités politiques, des entreprises, des associations et des chercheurs d’un très grand nombre de pays. L’objectif est de s’accorder sur des engagements à respecter pour protéger l’océan et ses écosystèmes de dégradations et de la pollution plastique, ainsi que pour limiter le changement climatique. Pour cela, des réunions et “ateliers” sont organisés sur plusieurs thématiques : la recherche, l’éducation, le tourisme, ou encore la manière de faire respecter des règles identiques par des pays différents : on parle de gouvernance mondiale. Tandis que les chercheurs présentent les résultats de leurs travaux scientifiques, les associations, ONG ou entreprises présentent leurs actions ou objectifs et les ministres reviennent sur les décisions politiques prises dans leur pays. Ces acteurs ont notamment promu la reconnaissance de l’océan - “mer nourricière” - comme un “bien commun de l’humanité” et sa protection aux échelles régionale et internationale.


L’après-midi, alors que Clément travaille et visite son futur appartement à Brest - il y sera en effet en stage pour analyser notamment les échantillons collectés en Antarctique, Amandine et Apoline sont de retour à Océanopolis pour observer les conférences et événements organisés pour le grand public : conférences scientifiques, discussions avec d’autres associations ou avec les médiateurs d’Océanopolis : c’est l’occasion de voir comment la recherche est diffusée à l’ensemble de la société !



Nous clôturons cette journée par un festin dans une délicieuse crêperie située dans le centre de Brest. Ce séjour breton a pour nous une agréable saveur…


Jeudi 10 février


Nous poursuivons notre séjour en assistant aux ateliers du sommet retransmis en visioconférence et aux événements organisés à Océanopolis, notamment la conférence participative. Sur le thème de la gouvernance de la haute mer et la protection de la sa biodiversité, différents intervenants ont participé à trois courts débats sur des thématiques discutées à l’ONU : l’exploitation des ressources minières des grands fonds, la protection des ressources génétiques marines et les enjeux de conservation et de pêcherie en haute mer. Mettant à l’honneur la biodiversité marine et la voix des non-humains, cette conférence invitait à réfléchir aux enjeux et aux modalités concrètes d’une meilleure gouvernance de l’océan et permettait au public de voter en faveur de solutions dans le but de protéger ces espaces.


Le soir, nous rencontrons Cyprien, membre de l’association installé à Brest. Il nous invite à partager des pizzas chez lui, sur le pont de son bateau amarré au port, dans la fraîcheur de la soirée.



Vendredi 11 février


Nous prenons le train tôt le matin pour aller accueillir le reste de l’association à côté de Lyon ! Nous quittons Brest sans avoir eu l’occasion de goûter au fameux kouign amann breton…


Samedi et dimanche 12 et 13 février


Direction Lyon pour célébrer les retrouvailles des membres de l’association ! Les quatres membres de l’expédition, Clément, Lana, Olivier et Baptiste vont enfin retrouver les autres membres de l’association restés en France, c’est un séjour plein d’émotions. Nous commençons ce week-end par un retour sur les conférences et engagements du One Ocean Summit, qui ouvre la discussion. C’est le moment aussi pour les 4 qui étaient partis en mer de partager leurs expériences à bord, illustrées par de magnifiques photographies et vidéos de manchots et de paysages…


Nous remercions les parents d’Apoline, notre présidente, qui nous ont chaleureusement accueillis chez eux pour ce week-end de travail.


Depuis plusieurs mois, nous travaillons majoritairement à distance, entre la France, l’Ecosse, la Norvège et l’Antarctique pour partager cette expédition scientifique. Ce week-end a donc été un temps fort pour nous retrouver et redonner un nouveau souffle à nos activités en cette période de retour de 4 des 6 membres de l’expédition. Sessions de travail sur les prochains événements de médiation et sur les projets de communication scientifique, réunions sur le financement ou encore mise à jour du site internet ont été au programme, dans la joie et la bonne humeur !


Ce rythme intense a été adouci par des moments de convivialité autour de délicieux cookies, de crêpes (inspirées par notre présence à Brest la semaine précédente), de spécialités ramenées d’Ushuaïa, et d’inimitables brioches pétries et façonnées avec professionnalisme et amour par Clément (rien de tel pour se sortir du lit) ! Sans oublier notre soirée raclette, à laquelle nous avons particulièrement fait honneur : il faut dire que le fromage français n’a pas d’égal en Antarctique, ni en Argentine…


(De gauche à droite: Patrick, Joanna, Clément, Amandine, Olivier, Baptiste, Lisa, Yann, Apoline, Lana, Paul-Adrien)


Dans cette ambiance festive, nous avons lancé la préparation de nouveaux ateliers d’initiation à la recherche scientifique, que nous avons nous-mêmes testés : saviez-vous que l’on pouvait créer des nuages dans un verre d’eau ou qu'on peut observer des micro plastiques au microscope ? Nous préparons en ce moment un projet d’exposition itinérante avec des ateliers passionnants…


Alors n’hésitez pas à suivre nos actualités pour découvrir nos prochains événements en préparation, les retours d’expérience de nos scientifiques à bord et la suite de leurs activités en laboratoire !


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